Après la votation sur la révision de l’AVS en septembre dernier, les regards sont maintenant braqués sur notre deuxième pilier, qui doit lui aussi être réformé au plus vite. Le Conseil fédéral avait émis une proposition, résultant d’un compromis entre les partenaires sociaux, à la fin 2020. Après être passé par le Conseil national, qui lui avait apporté de nombreux changements, c’est le Conseil des Etats qui s’est prononcé lors de sa session d’hiver. Le sujet est loin d’être clos et un référendum semble probable, ce qui déboucherait sur une votation populaire.
Article paru dans PME Magazine
Un système de trois piliers fort et efficace
Notre système suisse de prévoyance vieillesse basée sur trois piliers – AVS, prévoyance professionnelle (LPP) et prévoyance individuelle – continue de faire ses preuves et d’être souvent utilisé comme modèle de référence dans d’autres pays. En décembre 2022, ce système a d’ailleurs fêté ses 50 ans, avec la votation en 1972 de l’article constitutionnel décrétant que la prévoyance professionnelle devait reposer sur ces trois piliers. L’AVS est de son côté plus vieille que cela, avec son introduction en 1948. Quant au deuxième pilier, s’il existait déjà à ce moment-là sur une base volontaire, il est entré en vigueur de manière obligatoire en 1985.
Le projet AVS 21 n’était que le début
En 50 ans, la vie a bien changé et la prévoyance vieillesse a dû s’y adapter. Démographie, espérance de vie, rendements financiers ou nouveaux modes de travail, autant de critères qui ont demandé des adaptations occasionnelles. Ce modèle des trois piliers a ainsi subi plusieurs modifications tout au long de son existence. La plus récente est bien entendu le projet AVS 21, voté en septembre 2022 et qui entrera en vigueur au 1er janvier 2024. Il apportera un bol d’air durant quelques années aux finances de l’AVS mais devra ensuite être suivi par une réforme plus conséquente, afin d’assurer la pérennité de notre premier pilier.
Un deuxième pilier essentiel pour le niveau des rentes
Et il ne faut pas oublier que l’AVS n’est qu’une partie de la prévoyance vieillesse. La prévoyance professionnelle, aussi appelée LPP ou deuxième pilier, joue un rôle essentiel dans le niveau des rentes. Effectivement, les premier et deuxième piliers combinés permettent de couvrir 60% du dernier revenu avant la retraite. Il est donc évident que la LPP ne doit pas être négligée, d’autant plus qu’elle repose pour sa part sur un système de capitalisation, et non pas de répartition comme le fait l’AVS.
Une réforme pour prendre en compte les salaires modestes
La particularité du deuxième pilier est la déduction de coordination, qui permet de déterminer le salaire assuré auprès de la caisse de pension. Ce principe désavantage pourtant les salaires modestes et les temps partiels, des situations qui touchent particulièrement les femmes, par la suite désavantagées lors de leur arrivée à la retraite. Il sera important que la révision prenne ces éléments en considération, pour les intégrer d’une manière ou d’une autre dans le deuxième pilier. Tout le monde doit pouvoir se constituer un capital de prévoyance suffisant, y compris les personnes à temps partiel ou touchant un salaire modeste.
LPP 21 : un compromis entre les partenaires sociaux
C’est dans cette optique que les partenaires sociaux, à savoir l’Union patronale suisse, l’Union syndicale suisse et travail.suisse, avaient élaboré conjointement un texte de base pour le projet LPP 21. Celui-ci visait à garantir le niveau des rentes, à renforcer son financement et à améliorer la couverture des personnes à temps partiel. Les mesures proposées contenaient par exemple une diminution de la déduction de coordination et du taux de conversion, une adaptation des bonifications de vieillesse, ou encore l’introduction d’un supplément de rente durant une période transitoire de 15 ans.
Le projet prend du retard et ce n’est pas terminé
Le Conseil fédéral avait transmis ce texte au Parlement à la fin 2020. En décembre 2021, le Conseil national avait adopté une version modifiée de ce projet, qui édulcorait notamment les mesures envisagées pour compenser la baisse du taux de conversion. Quant au Conseil des Etats, après avoir renvoyé le projet à sa Commission de la sécurité sociale en juin 2022, il a finalement traité l’objet lors de la session d’hiver passée. Il a choisi une variante un peu plus généreuse que le Conseil national, mais moins que celle concoctée par les partenaires sociaux.
Le projet devra maintenant à nouveau repasser par le Conseil national et il n’est pas à l’abri d’un référendum et donc d’une votation populaire. Cela signifie que du retard va être pris, dans une situation où il devient urgent de renforcer notre système des trois piliers. Il devra être traité dans les meilleurs délais, si l’on veut que les modifications puissent entrer en vigueur au plus vite.